Mission parlementaire en Grèce. Urgence et besoin d’Europe.

Edito.

Mon parcours personnel, associatif et politique m’a mis face à nombre de situations dramatiques. Mais au retour de cette mission d’information en Grèce – les propos qui suivent n’engageant que moi bien entendu – l’intense désespérance et les souffrances aiguës rencontrées resteront de douloureux repères.

Il serait indécent de dire que l’on ne sort pas intacte d’une telle mission, tant les personnes croisées étaient déjà amputées de bonheurs auxquels chacun a pourtant droit. Elles n’en sortiront pas intactes. Moi, si. Mais ce sont des émotions qui marqueront mon parcours tant notre impuissance européenne est manifeste, tant notre réponse politique n’est pas à la hauteur de l’enjeu.

L’objectif de la mission était clair : comprendre comment les systèmes et mécanismes européens fonctionnent dans le cadre de prises en charge de flux exceptionnels.

Lors de l’élaboration du programme de déplacement nous avons fait en sorte – avec mes collègues Marietta Karamanli, Christian Assaf, Erwann Binet et Jean Marc Germain -  d’éviter au maximum les RV convenus ou d’obligations. Aussi, rencontres institutionnelles et associatives (ONG…), visites de terrain et échanges informels ont structuré les 3 jours passés sur place. Je pense notamment aux visites de 5 camps de réfugiés, aux échanges avec l’OFPRA, l’OFII et le Président de la République Grecque.

Je retiens suite à ces rencontres :

          – Des échanges institutionnels sans fard au cours desquels le besoin de plus d’Europe, d’une Europe plus humaine, a été le trait d’union à tous nos RV ;
          – Des rencontres fortes, incongrues, explosives parfois, en particulier dans le camp d’Idomeni. Je pense à ces enfants qui jouaient à la balle au prisonnier dans le camp de Diavata  ou              à la marelle dans le camp de Nea Kavala.

Pour comprendre la situation des réfugiés, il faut bien avoir à l’esprit qu’avant le 20 Mars, les migrants étaient en transit sur le territoire Grec, de passage avant de poursuivre leur exode sur la route des Balkans. Ils sont désormais bloqués sur les Iles et le continent dans des camps plus ou moins organisés. Pour le HCR, ils sont 53 000, soutenus de leur mieux par les autorités helléniques. La France prend ses responsabilités et sa place, organisant les contacts pour relocaliser les familles syriennes, Erythréennes ou irakiennes. Dans un contexte d’une rare complexité, l’Ambassade, les Services de l’OFII et de l’OFPRA s’engagent pleinement. A ce jour, 581 étrangers ont été « relocalisés », sur un total de 53 000 … Dérisoire… La France demeure la plus volontaire avec 242 migrants installés sur notre sol, auxquels il faut rajouter 120 arrivées depuis une semaine. Chacun l’aura compris, ces chiffres sont très éloignés des 6 000 attendues, alors que les populations répondent aux critères du statut de réfugié.

De retour, le constat est clair :

          – Le désastre administratif en Grèce est patent. Les flux sont tels que l’Administration ne peut offrir un suivi de qualité. Les camps informels et insalubres fleurissent, dans lesquels les              plus fragiles le deviennent encore plus. Face à ce désordre, la population grecque réagit avec cœur et humanité.
          – Le système européen est à bout de souffle, en faillite.
          – Il faut lutter contre les passeurs  qui profitent et abusent de la faiblesse, de la détresse des personnes, notamment des femmes. Cela ne pourra se faire que si l’Union Européenne                        accepte de prendre ses responsabilités en termes de politique d’asile.
          – La nécessité de s’occuper des mineurs étrangers isolés, grands oubliés des programmes de relocalisation.

Ces constats ne doivent pas nous amener à faiblir mais au contraire à renforcer notre détermination. Dans l’idéal un droit d’asile européen doit s’imposer. Cette nécessité, au vu du contexte européen, étant inaccessible, il importe de se mobiliser sur ce qui est faisable, accessible à court et moyen terme.

La mission et son rapporteur vont rendre un rapport. J’y prendrai ma place. Mais dès maintenant je vais tout faire pour interpeller les autorités pour que notre devoir de solidarité envers ces populations soit mis en œuvre, en particulier les mineurs étrangers isolés. Je vous tiendrai bien entendu informés des suites données à cette mission.

Marie-Anne Chapdelaine

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