Même si j’avais su je serais venue !

Edito

« Si j’aurais su,  j’aurais pas venu » disait Tigibus dans « La guerre des boutons ».

Toutes celles et tous ceux qui portent des idées progressistes sont chahutés – voire violentés – dans leur for intérieur par la remise en cause des principes qui ont fondé notre engagement et par une radicalisation sans précédent du programme des Droites, républicaines ou non.

Dans un tel contexte, il est humain de se chercher, de douter parfois, de se demander – comme Tigibus – si tout cela en vaut bien la peine. Pour ma part, lorsqu’il y a doute, il s’efface vite devant certaines réalités :
- une misère sociale à combattre en permanence et son corollaire, la prééminence d’une action publique qui ne doit jamais baisser les bras car seule vouée à réduire les inégalités ;
- la nécessité de soutenir celles et ceux qui osent, associativement en fédérant les temps libres ou économiquement en créant puis redistribuant de la richesse ;
- les premiers résultats d’un quinquennat que l’Histoire jugera moins sévèrement que l’actualité ;
- une droite républicaine qui copie sa droite extrême et une extrême droite qui séduit plus que jamais.

Bref, entre ceux qui créent des ponts ou des murs, comme le dit si bien Jean-Michel Le Boulanger, vice-président du Conseil régional de Bretagne, il importe d’accompagner les constructeurs de ponts.

Que la situation politique soit inédite — une incapacité de la gauche à s’unir, deux candidats de droite aux comportements individuels indécents et inquiétés par une justice libre -  ne doit pas laisser à penser que la sortie de crise est à inventer : elle ne porte qu’un nom, le rassemblement. Ce qui reste à inventer, c’est son périmètre. Voilà où nous sommes attendus, nous qui sommes en situation de responsabilité politique.

Aussi, je ne vois aucune raison d’encourager celles et ceux d’entre nous — je parle du peuple de gauche — qui stigmatisent les choix complexes que chacun est amené à prendre dans cette présidentielle. Au contraire, je crois depuis le début en un axe qui réunira EELV, le PS et le mouvement « En marche ». Nombre d’électeurs d’extrême Gauche le rejoindraient conscients de cette nécessité politique à l’heure de la remise en cause des principes républicains dans nos frontières ou à leurs portes. Il nous reste 37 jours avant le premier tour de l’élection présidentielle et nous sommes à 51 jours d’un second tour que le parti socialiste n’a jamais vu d’aussi loin. Et ma sensibilité espérerait la gagner en caricaturant le mouvement En Marche ? Fausse route !

Je ne fais pas de politique pour être dans l’opposition : regarder passer le train ne m’intéresse pas quand je vois les urgences sociales qui restent à satisfaire. Je fais de la politique pour donner sens et priorités à l’action publique, pour libérer l’esprit d’entreprendre. Je ne regrette donc jamais d’être venue en politique quand bien même la situation se révèle de plus en plus complexe. Cessons les tweets qui fustigent, les post sur facebook qui laissent à croire que notre bon mot entrera au Panthéon des citations de l’Histoire de France. Que chacun trace la route de son candidat, consacre ses efforts à le faire gagner. Entre les programmes d’Emmanuel Macron et de Benoît Hamon il n’y a pas plus de distance qu’il n’y en avait initialement entre celui d’EELV et celui du PS : tous ont un maître mot, celui d’une république progressiste. Et si il y a des points de désaccords structurants, gageons que les accords politiques — et assumons qu’il y en aura ! — permettront de les surmonter.

Tigibus est un enfant. La politique, ce sont des rêves d’enfance portés par des adultes : moins tendres certes, mais un accord politique ne fait pas toujours un instant d’émotion pure. Assumons donc, chacun dans son rang, les erreurs qui nous ont portées à ce point de crise politique, et n’insultons pas l’avenir dès lors qu’il est porté par des gens de progrès. La complexité du rassemblement en nombre sera bien plus utile que la simplicité de la défaite à quelques uns. Voilà pourquoi dans cette séquence politique, chacune des difficultés me porte vers l’action et au rassemblement le plus large de la gauche et des progressistes.

Marie-Anne Chapdelaine. Députée

Soutien de Benoît Hamon

« »