Nouveaux droits et accès aux droits
0 commentaires 23 mars 2017 par Marie-Anne Chapdelaine
Quatre ans après la catastrophe du Rana Plaza au Bangladesh qui avait tué plus d’un millier d’ouvriers et fait plus de 2000 blessés, la France et le législateur ont su apporter les réponses nécessaires pour mettre les sociétés donneuses d’ordre devant leurs responsabilités.
Nous avons définitivement adopté à l’Assemblée nationale, avec l’unanimité des groupes de gauche, la loi relative au Devoir de vigilance des sociétés mères et des entreprises donneuses d’ordre. Les grandes entreprises françaises qui sous-traitent leurs productions dans les pays à mains d’œuvre à bas coûts ne pourront plus négliger ou ignorer les atteintes aux droits de l’Homme et aux libertés fondamentales, les dommages corporels ou environnementaux et les risques sanitaires. Le cadre de leurs obligations (plan de prévention…) et les sanctions afférentes sont par celle loi précisément définis.
Ce texte est une avancée historique qui sera un exemple et une source d’inspiration pour élargir ce dispositif sur l’ensemble de l’Europe.
Pour connaitre précisément son contenu, c’est ICI
La commission des lois auditionnait J. Toubon, défenseur des Droits, mardi 21 février, sur la présentation de son rapport annuel avant publication. J’ai souhaité l’interroger sur l’accès aux droits des plus fragiles, le lien des citoyens avec les forces de police, sur la nécessité d’organiser la revendication…
Retrouvez mon intervention :
et les réponses du Rapporteur à mes questions :
Le 24 avril 2013 un immeuble de Dacca au Bangladesh abritant une usine textile s’effondrait faisant 1 135 morts. L’usine était la sous-traitante de nombreuses marques de vêtements européennes, y compris françaises. L’émotion suscitée par le drame du Rana Plaza a été intense et légitime. Cette catastrophe est venue interroger la position de notre société face aux évolutions de l’économie. Depuis longtemps notre économie s’est internationalisée. La division internationale du travail est devenue la norme : des matières premières prélevées sur un continent sont transformées dans un deuxième, les pièces détachées assemblées dans un troisième et le produit final est vendu sur un quatrième continent. Bien souvent, ces tâches de production sont sous-traitées, c’est-à-dire déléguée à des entreprises subalternes à la société donneuse d’ordre qui vend le produit final. Il arrive que ces sociétés mères prennent des risques choquants ou ferment les yeux sur des pratiques indécentes sous prétexte que la législation sociale est faible ou inexistante dans les pays ou sont basés les sous-traitants. Le drame humain du Rana Plaza comme le drame environnemental de l’Erika il y a 15 ans sont la preuve qu’il est nécessaire de mettre les sociétés donneuses d’ordre devant leurs responsabilités.
Une question a rapidement émergé : que peut-faire la France et le législateur pour éviter qu’un tel drame se reproduise ? Un constat s’est d’abord imposé : les « bonnes pratiques » développées par les entreprises depuis plusieurs années sont pertinentes mais pas suffisantes. L’intervention du législateur était donc nécessaire. Le 29 novembre dernier, l’Assemblée nationale a adopté en nouvelle lecture la Proposition de loi relative au Devoir de vigilance des sociétés mères et des entreprises donneuses d’ordre. Ce texte, porté par mon collègue Dominique Potier, député de Meurthe-et-Moselle, a pour ambition de mettre les grandes entreprises qui externalisent leur production devant leurs responsabilités.
Le premier volet de la loi est l’instauration d’un plan de vigilance. Les grosses entreprises dont certaines filiales, sous-traitants ou fournisseurs sur lesquels elle exerce une influence déterminante qui sont situés à l’étranger devront désormais élaborer un plan de vigilance des risques d’atteintes aux droits de l’Homme et aux libertés fondamentales, de dommages corporels ou environnementaux et de risques sanitaires. Ce plan sera public et pourra faire l’objet d’un contrôle par le juge sous saisine d’une personne, d’un syndicat ou d’une association.
Le deuxième volet de la proposition de loi est la mise en place de la responsabilité civile de la personne morale en cas de dommages liés à ses activités. La faute est caractérisée en cas de non-respect du plan de vigilance et s’il existe un lien de causalité entre la faute et le préjudice. L’amende encourue est de 10 millions d’euros.
Ce texte sera adopté en lecture définitive dans le courant du mois de janvier pour une application que j’espère rapide. Je veux également souligner qu’il a été voté par tous les groupes de gauche à l’Assemblée nationale, alors que la droite a voté unanimement contre. Ce texte sera sans doute la dernière pierre du quinquennat de François Hollande en matière de moralisation de l’économie. Souvenons-nous de la loi de séparation des banques de dépôt et des banques d’investissement. Souvenons-nous de la loi Sapin II sur la transparence, la lutte contre la corruption et la modernisation de la vie économique. Toutes ces lois n’avaient qu’une ambition : responsabiliser les acteurs économiques, et placer la protection des êtres humains au-dessus des profits.
Marie-Anne Chapdelaine
L’Assemblée nationale a examiné et voté ce Jeudi 1er Décembre la proposition de loi sur le délit d’entrave à l’IVG. Rappelons que des amendements ont été présentés au Sénat – et rejetés par sa majorité – à l’occasion de l’examen très récent du Projet de Loi Egalité et Citoyenneté.
Face à la multiplication de sites de désinformation, qui plus est perversement – j’insiste sur ce qualificatif – non sourcés et anonymes, il importait de réagir car trop de femmes sont abusées dans leur recherche de renseignements. Remettre de l’ordre, voici donc le sens de cette proposition de loi : permettre à chacun d’exprimer ses opinions, mais pas de diffuser des mensonges. Comme le disait sur France Info ce matin la Ministre Laurence Rossignol, « la liberté d’informer ce n’est pas le droit au mensonge ».
Alors qu’en pareille situation les femmes sont en souffrance et questionnements, il importe de ne pas rajouter de pression inutile et de leur assurer une information objective. Je ne méconnais pas la complexité de l’application d’une telle loi – la jurisprudence sera attendue – mais il importe à mes yeux que la puissance publique soit présente aux cotés des femmes et des familles dans leur parcours de vie et les décisions qui l’accompagnent.
Je suis fière de ce vote, il renforce la loi Veil qui nécessite une veille permanente afin qu’elle ne soit pas remise en cause.
Marie-Anne Chapdelaine
Mon intervention en séance :
Le 26 octobre dernier, la mission d’information sur l’offre automobile française dans une approche industrielle, énergétique et fiscale a remis son rapport au Président de l’Assemblée Nationale, Claude Bartolone. Cette mission, créée il y a un an et dont j’étais membre, a mené plus de 40 auditions de tous les acteurs clés du secteur : constructeurs, équipementiers, associations professionnelles, Ministères… Ce travail nous a permis d’avoir une vue d’ensemble sur l’avenir de la filière automobile et de formuler 120 propositions.
La proposition phare de ce rapport est la signature d’ici à la fin de l’année d’un protocole d’engagements réciproques entre l’Etat et la filière automobile. L’Etat s’engagera par exemple à obtenir une harmonisation des normes européennes en matière de pollution, à temporiser à 5 ans l’entrée en vigueur d’une nouvelle norme pour laisser au secteur le temps de s’adapter, à renforcer les contrôles anti-pollution en France en créant une agence indépendante, ou encore accélérer le déploiement des infrastructures électriques. De son côté, le secteur automobile s’engage à renforcer ses investissements pour la recherche et le développement des nouveaux véhicules de demain, à faire preuve d’exemplarité et de transparence en matière d’émissions polluantes, ou encore à accélérer la modernisation des usines pour diversifier la production et maintenir les bassins industriels.
L’industrie automobile doit aujourd’hui faire face aux défis qui sont ceux du moment : ceux de la concurrence internationale et de la transition énergétique. Ce rapport a pour ambition d’avancer des propositions pour y faire face.
Sur le volet de la compétitivité, nous proposons notamment d’harmoniser les normes européennes en matière d’homologation ou encore d’apporter un soutien public au label « Origine France Garantie ». Nous souhaitons que l’Etat maintienne sur le long terme ses investissements dans le capital de Renault et PSA. Et parce que la compétitivité ce n’est pas seulement le prix mais aussi la qualité et l’innovation, nous voulons soutenir les dépenses de recherche et développement pour les véhicules hydrogènes.
Sur le volet environnemental, nous voulons exiger de l’Union Européenne qu’elle fixe des seuils limites d’exposition aux polluants selon les normes établies par l’OMS. La fiscalité sur le diésel et l’essence devront également converger d’ici 5 ans. Pour répondre au récent scandale des véhicules Volkswagen, nous souhaitons notamment étendre l’action de groupe aux préjudices moraux et environnementaux et renforcer les sanctions en matière de tromperie et de fraude à l’évaluation. Enfin, nous proposons d’instaurer une prise en charge à 100% des formations à l’éco-conduite.
L’automobile est un secteur clé pour le dynamisme économique de notre circonscription. Des centaines d’emplois directs et indirects en dépendent. Depuis 2012, le Gouvernement, s’est engagé dans une politique industrielle ambitieuse pour préserver l’industrie automobile avec par exemple la recapitalisation de PSA par l’Etat en 2012. L’automobile est un secteur industriel historique de la France et il représente des dizaines de milliers d’emplois sur tout le territoire. Il se doit d’être préservé.
Vous pourrez retrouver l’intégralité de nos travaux sur les liens suivants :
Tome I: Rapport et propositions
Tome II: Comptes rendus des auditions
Marie-Anne Chapdelaine est intervenue hier dans l’hémicycle à l’occasion de la deuxième lecture en séance publique du Projet de loi Egalité et citoyenneté. L’occasion de faire le point sur l’avancement des discussion sur ce texte après son passage au Sénat et en commission spéciale à l’Assemblée nationale. Elle s’est exprimée en particulier sur le Titre III du projet de loi qui vise à lutter contre toutes les formes de discrimination et dont elle est Rapporteure. L’examen de ce texte se poursuivra tout au long de cette semaine.
Retrouvez le texte de son intervention et la vidéo ci dessous.
Madame la Ministre,
Notre gouvernement a fait le choix de lutter avec détermination contre le harcèlement, sous toutes ses formes. Il était temps de prendre la mesure du phénomène tant il a meurtri – tué parfois – des générations.
Chacun sait que ce combat nécessite un temps considérable et une débauche d’énergie pour porter ses fruits. Les motifs sont connus et multiples: parce que dans le combat entre le plus fort et le moins fort le premier a en général et malheureusement plus de moyens de défense que le second, et c’est là que toute la puissance publique doit intervenir ; parce que dans les usages d’une société il y a parfois des pratiques humoristiques tolérées à tort au nom d’une pseudo tradition que personne bien souvent ne parvient pas tracer ; parce qu’il est souvent bien plus facile et confortable de se ranger du coté de la minimisation de la brimade que de celui qui cherche à l’analyser…
Aujourd’hui je souhaite vous interpeller sur les pratiques répétées et déplorables de l’animateur Cyril Hanouna dans son émission quotidienne. A titre personnel il me fait peu rire mais je n’aurai pas la suffisance de me positionner en arbitre de la bonne ou mauvaise blague. Mais j’ai par contre en tant que députée et comme citoyenne une très forte interrogation : celle qui consiste, à une heure de très grande écoute, de tolérer des agissements répétés et vexatoires – que l’assentiment de la victime ne transforme pas en un chèque en blanc à celui qui porte les coups – alors que de l’autre la puissance publique, les professionnels, les associations et les parents se mobilisent. Si une main médiatique détruit en quelques minutes ce que la main de la puissance publique construit avec beaucoup de justesse en plusieurs mois, alors il importe que la représentation nationale s’en saisisse.
La liberté d’expression m’est chère, je ne cesserai jamais de la défendre. Mon questionnement ne vise donc pas ni l’émission en elle même, ni son principal animateur et producteur. Lorsqu’un parlementaire manque de courtoisie dans l’hémicycle, il est un mauvais exemple. Lorsqu’un sportif de haut niveau porte un mauvais geste sur un terrain également. Le comportement des animateurs télé n’échappe pas à cette logique surtout lorsque leur audience est aussi élevée. Ce que je défends, c’est seulement que cette relation détestable soit mise en vitrine car il est su de toutes celles et ceux qui éduquent que cet humour malsain d’une star médiatique légitimera d’autres abus que nous ne pouvons ni ne voulons plus tolérer.
Je vous remercie, Madame la Ministre, de me faire connaître votre position à ce sujet.
Bruno Le Roux vient de publier une Tribune argumentée, charpentée. Elle me semble judicieuse dans le contexte actuel. J’ai donc souhaité la porter à votre connaissance en suivant ce lien.
Edito
Je me suis rendue lundi 24 Octobre à Calais pour observer et analyser les opérations d’évacuation ainsi que rencontrer les migrants, les ONG et les autorités. Accompagnée de mon collègue Erwan Binet, j’ai constaté à quel point le Gouvernement démantelait le site à juste titre, avec humanité et rigueur. Je veux souligner ici l’esprit et la méthode qui ont présidé à cette opération. Mercredi, plus de 4 000 personnes avaient déjà été mises à l’abri dont près de 800 mineurs. Le tout sans qu’aucun incident majeur ne soit à déplorer. L’évacuation s’est déroulée dans le calme, grâce à une organisation millimétrée des autorités. Depuis plusieurs années, la « jungle de Calais » – je n’aime pas ce terme pour être honnête – faisait régulièrement la une de l’actualité, alimentant les controverses, les polémiques, et même parfois la désinformation au détriment de la vérité et de l’objectivité. Il convient donc de rétablir les faits.
S’il fallait évacuer le camp de Calais, c’est tout simplement parce que la situation était devenue inacceptable. Inacceptable pour les Calaisiens qui voyaient l’image de leur ville et l’économie locale se dégrader. Inacceptable pour les forces de l’ordre qui étaient la cible de violences répétées de la part de personnes désespérées et cherchant par tous les moyens à franchir la frontière. Inacceptable pour l’image de la France qui laissait se développer un gigantesque bidonville et qui semblait impuissante à venir en aide à ces personnes. Inacceptable, enfin Lire la suite de cet édito